"Pas de Panique"   Docteur Gérard Apfeldorfer

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Peut-on avoir peur sans s'en rendre compte ?

Les trois composantes de la peur.

 

La peur se compose de trois facettes. Et celles-ci n'ont que trop tendance à évoluer chacune pour leur compte.

 

Il y a tout d'abord la "peur viscérale". Il s'agit de la façon dont son corps réagit devant le danger : on pâlit, on sue, on tremble, on se crispe et ainsi de suite.

 

Vient ensuite la "peur mentale". Il s'agit de la façon dont on vit la peur sur le plan subjectif. Face à une situation que l'on vit comme dangereuse, on imagine, on s'auto-suggestionne, on s'auto-observe.

 

Il y a enfin la façon dont on se comporte : on fuit lâchement, on fait face avec courage, on se cache la tête dans le sable. C'est la "peur comportementale". Celle sur laquelle vous serez jugé, étiqueté brave, vaillant, audacieux, ou bien peureux, couard, craintif.

 

La plupart du temps, la peur ne fait pas le détail : les peurs viscérale, mentale et comportementale sont toutes trois bel et bien présentes. Généralement, mais pas toujours. Et, qui plus est, les proportions ne sont jamais les mêmes.

 

Il est par exemple, parfaitement possible de ressentir une intense peur mentale, d'avoir la sensation que l'on va mourir d'angoisse, là, sur le champ : mais si on ne le montre pas, si on fait front malgré tout, si on fait ce que l'on a à faire, alors, un peu plus tard, on pourra se dire que l'on a été courageux et se tresser quelques couronnes de laurier. Pourtant cet acte de bravoure aura toutes les chances de passer totalement inaperçu : comme vous ne vous êtes pas mis à trembler comme une feuille, comme vous n'avez eu ni malaise, ni crise d'agitation, votre entourage en conclura que vous n'avez fait que ce que aviez à faire. Bien des angoissées et des phobiques sont familiers de ces victoires sans gloire. Et n'est-il pas injuste que leur courage ne soit pas reconnu ? Car, après tout, ils auraient aussi bien pu baisser les bras, décider qu'ils ne pouvaient pas affronter la situation, appeler un membre de leur famille à la rescousse pour les aider, ou tout bonnement renoncer à sortir.

  

Une autre possibilité, presque aussi fréquente, est que votre corps se mette à réagir alors que votre esprit reste calme. Mme Thé, caissière dans une boutique raconte : "chaque soir, je suis chargée de déposer la sacoche contenant la recette de la journée dans le casier de notre agence bancaire, située à cent mètres de là. J ne me considère pas comme quelqu'un de peureux ou d'anxieux. Pourtant, si quelqu'un s'approche pendant que je tape le code d'ouverture du casier, je m'aperçois que mes mains deviennent moites et se mettent à trembler. Cela va parfois jusqu'à une sensation de vertige assez déplaisante. J'ai pourtant du mal à croire que ce soit de la peur car je me sens parfaitement calme. C'est un peu comme si je me dissociais : mon corps a peur mais, moi-même, je reste calme et sans appréhension particulière".

 

Un autre exemple de dissociation s'observe au cours des traitements comportementaux des phobies. Le plus souvent, c'est la peur viscérale qui disparaît en premier : on parvient alors à affronter la situation phobique et à dominer sa peur comportementale. Mais la peur mentale ne disparaît, la plupart du temps, qu'avec un certain retard : le phobique, bien qu'il se rende compte qu'il fait désormais des choses qui, il y a peu de temps encore lui étaient tout à fait impossibles, a malgré tout la sensation d'avoir toujours aussi peur. Durant toute cette période intermédiaire, le phobique devra donc savoir prendre son mal en patience et ne pas désespérer car ce n'est qu'au bout d'un temps de l'ordre de quelques semaines que sa peur subjective s'effritera à son tour. C'est alors, et alors seulement que l'on pourra parler de guérison. Mais nous reviendront sur tout cela dans le chapitre consacré au traitement des peurs et des phobies.

  

L'angoisse, la peur, sont affaire d'imagination plus que de réalité,

D'interprétation des événements plus que des événements eux-mêmes.

   

La phobie d'impulsion :

 

Certains phobiques ont peur de se suicider malgré eux, par exemple en se défenestrant ou en se plantant une lame dans le corps. Que penseraient-ils du doux nom d'autocheirothanatophobes ? Certaines mères craignent de tuer leur bébé, leur mari, certains maris craignent d'être pris de l'impulsion irrésistible de tuer leur femme. D'autres encore ont peur de s'en prendre à n'importe qui, tels certains coiffeurs pour hommes pour qui la phobie d'impulsion est une véritable entrave à leur épanouissement professionnel : il s'agit là de la peur d'être pris de l'impulsion irrésistible d'égorger leur client au lieu de simplement le raser.

 

Conseils aux phobiques d'impulsion :

 

Si vous avez peur de tuer votre enfant avec un couteau ou de pousser un inconnu sous les roues du métro, habituez-vous en imagination, puis en réalité, à être près du petit dernier tout en découpant une volaille ou à vous tenir sur un quai sans pousser personne. Si vous n'avez pas absolument confiance en vous, commencez en présence d'une tierce personne. Mais rappelez-vous : vous n'êtes pas le genre de personne qui passe à l'acte. Si vous ne me croyez pas sur parole, demandez l'avis d'un médecin, d'un psychologue ou d'un psychiatre.

 

Conseils aux phobique de la mort et des maladies :

 

Vous allez mourir, Moi aussi. Vous avez peur. Moi aussi. Mais, contrairement à vous, ne j'y pense pas en permanence. L'embêtant avec vous, ce n'est pas que vous ayez peur d'avoir le cancer ou de trépasser, c'est que ne pensez qu'à cela. Il vous faut donc vous arrêter de penser. Plus facile à dire qu'à faire, direz-vous. Mais il existe une méthode comportementale qui donne des résultats appréciables et qui s'appelle l'arrêt de la pensée.

 

L'arrêt de la pensée :

 

L'arrêt de la pensée s'adresse aux personnes qui ne cessent de ruminer des idées à l'intérieur de leur tête sans pouvoir s'en empêcher. Il s'agit donc plus d'obsessions que de phobies à proprement parler. Sont dans ce cas ceux qui souffrent de phobies d'impulsion, de phobies des maladies, de la mort.

La technique est extrêmement simple, mais demande beaucoup de constance pour être efficace. Grâce à un entraînement quotidien, vous parviendrez à bloquer toute pensée parasite grâce à un """STOP""" mental, puis à lui substituer une pensée positive de remplacement.